Extrait des écrits du Curé Piot


Article posté le 02/28/17.

 

En cette période pré-électorale...

Voici un extrait d'un des manuscrits de l'abbé François-Joseph-Auguste Piot évoqué dans le précédent article. Il a été rédigé lors des élections législatives d'octobre 1885 :

"Voici quel fut à Suzannecourt le résultat du vote. Il me fut dit qu’au dépouillement du scrutin, les candidats conservateurs n’ont eu, sur 90 votants environ, que vingt-six voix et les autres soixante-quatre. Les dernières opérations de l’élection à peine terminées, deux ou trois électeurs tapageurs descendant quatre à quatre les escaliers de la mairie, gens sans religion et qui auraient besoin qu’on leur jetât des pièces de cent sous, ne pouvant contenir en eux-mêmes l’enthousiasme de la victoire, se permirent de vociférer à pleins poumons, dans la rue, en face de la Cure, leur fameux cri de : Vive la république ! Il était facile de comprendre le sens de cette acclamation.

Quelques pas plus loin, après une petite altercation, les mêmes voyous crièrent aussi à l’adresse des bons chrétiens : A bas les porte-dais. On se gardera bien de se coucher à la nuit tombante. Vers 11 heures, on entendit : On les pendra au clocher ces vingt-cinq retardataires ! Il s’en est peu fallu qu’on en vint à une bataille ; ces mêmes criailleurs demandaient la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Qu’on sépare tout ! Qu’on sépare les Juifs et les Protestants ! leur a-t-on répondu.

Le lendemain de l’élection, lorsqu’un de mes paroissiens me fit connaître le résultat, sans être surpris, je fis semblant de le paraître. « Voici sa réponse : il n’y a que les indépendants à Suzannecourt qui ont voté pour les Conservateurs : Notre maire est sous la tutelle de M. Capitain, notre Conseiller Général ; et les trois quarts des électeurs sont sous la dépendance de notre maire. Et, ajouta encore ce paroissien, les vraies raisons intimes de cette élection ; c’est la crainte de déplaire l’un ou à l’autre, c’est la peur d’une restauration monarchique ; le pauvre monde serait bientôt forcé d’aller à la messe et bientôt à confesse ; on verrait bientôt le gouvernement des Curés et le rétablissement des droits des seigneurs et de la dîme. Ce serait donc leur faire injure de dire que les autorités municipales, le Conseil de la Commune, les Pompiers, le Garde Champêtre, l’Instituteur, ont voté pour des réactionnaires, tant ils ont tous été travaillés par le Conseil Général, les notaires, les médecins &e sans oublier l’Instituteur. »

C’est une honte pour Suzannecourt d’avoir de nouveau nommé des députés sortants qui ont voté les lois athées de l’enseignement et qui ont applaudi des deux mains à la conduite du Gouvernement dans toutes ses mesures antireligieuses."

 

  Retour